L’oligarchie désigne la tendance d’une organisation « démocratique » à investir prioritairement son personnel dirigeant lors des consultations électorales. Ce processus se fait au détriment des militants de base qui, au regard des procédures formelles et de leurs états de service, mériteraient l’investiture de l’organisation. La « revanche » de ces exclus entrants en dissidence passagère se traduit par des candidatures indépendantes que la direction de l’organisation politique assimile trop rapidement à des actes d’indiscipline.
Il a été clairement démontré que le phénomène oligarchique est consubstantiel à toute organisation politique. Le parti politique est la source d’où naît la dénomination des élus sur les électeurs, des mandataires sur les mandats, des délégués. Qui dit organisation, dit oligarchie. Ce phénomène engendre une « imposture démocratique »: le pouvoir reste concentré entre les mains d’un groupe restreint dont les aspirations sont souvent éloignées de celles des électeurs.
Au cours de son long règne, le parti démocratique gabonais (PDG) a sécrété une oligarchie qui détient et exerce le pouvoir politique et économique au Gabon. La matrice originelle de cette oligarchie est composée de segments de l’élite politique qui a émergé au début des années 1960. Essentiellement constituée des jeunes fonctionnaires et des premiers étudiants gabonais formés en France, cette élite a été à l’origine de la création du PDG en 1968.
Dans sa stratégie de dénomination du champ politique gabonais, elle a élargi sa base sociale en captant progressivement les autres segments de la société, principalement les anciens contestataires de l’Association générale des étudiants du Gabon (AGEG). Ce large processus d’« assimilation réciproque» des élites a été rendu possible grâce aux énormes ressources économiques et financières à la disposition de l’État gabonais.
Le relatif épuisement de ce compromis politique a été l’une des causes des mouvements sociaux qui ont conduit à la libéralisation de 1990. Quelque peu malmenés au début de ce processus, les oligarques gabonais ont progressivement repris le contrôle du parti et de l’État et sont parvenus à coopter et à domestiquer, dans des formes de gouvernement de large consensus ou d’une union nationale, les nouvelles élites politiques qui s’exprimaient bruyamment au début des années 1990.
Ils ont ainsi donné à la libéralisation politique des années 1990 la forme et le contenu d’une révolution passive qui n’a pas remis en cause les grandes asymétries de pouvoir et de richesse qui structurent l’État post-colonial gabonais.
À dire vrai, le familialisme est un invariant du champ politique gabonais. Depuis la période coloniale, c’est un mécanisme qui assure largement la reproduction des catégories dirigeantes au sein de l’appareil étatique.
Par Arthur ASSEKO
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