Leader de l’église Nazareth du Gabon et membre de la société civile, Georges Bruno NGOUSSI évoque dans cette interview exclusivement accordée à G9INFOS, la problématique des nuisances sonores, les raisons de sa convocation à la Direction générale de recherche (DGR), et les libertés dans notre pays.
G9INFOS : Le parquet de Libreville qui entend prémunir les populations contre les nuisances sonores a échangé le 25 mars dernier avec les responsables des églises de réveil, qui semblent particulièrement pointées du doigt. Qu’en est-il exactement ?
Georges Bruno NGOUSSI : Je voudrais d’abord dire que la loi sur les nuisances sonores existe depuis longtemps. La loi en elle même n’est pas mauvaise. Elle a été voté à l’époque du président Omar Bongo Ondimba, et elle devrait prendre en compte tout ce qui concoure à la nuisance sonore. Cela peut être des temples traditionnels, mosquées, snack bars ou buvettes. Si la loi s’applique à tout le monde on comprendrait. Mais ce qui nous préoccupe aujourd’hui c’est le fait que cette loi soit discriminatoire. Limiter ce phénomène aux seules églises de réveil s’apparenterait à de l’acharnement. Nous avons déjà eu une séance de travail avec tous les responsables des églises de réveil à ce sujet. Nous ferons une déclaration d’ici peu.
G9INFOS : Blocage de passeport à l’aéroport de Libreville, convocation à la DGR, vos relations avec le pouvoir ne sont pas idylliques?
Georges Bruno NGOUSSI : Il faut savoir que je suis cet homme qui a mené une lutte de résistance contre ce qui se fait en mal actuellement dans notre pays. J’ai condui une délégation gabonaise de la société civile à la Cour Pénale Internationale ( CPI), la Commission des Droits de l’Homme à Genève, en Belgique, l’Union Européenne, l’Assemblée nationale de France. Peut être que c’est dérangeant pour certaines personnes, ce qui a entraîné ces restrictions à ma liberté de mouvement. On a fait du bruit, mon passeport a été restitué. Il fut un temps où nous avons continué à mettre la pression sur les instances dirigeantes, pour que la clarté soit faite autour de ce qui se fait. Cette clarté nous l’avons exigé lors d’une déclaration, ce qui a conduit à mon interpellation à la DGR.
G9INFOS : Pensez-vous comme certains acteurs de la société civile que la démocratie est en récession au Gabon ?
Georges Bruno NGOUSSI : Je suis parmi les premiers à le dire. Dans un pays où les gens ne peuvent pas s’exprimer librement, qui connait une érosion des libertés, qui enregistre un grand nombre de personnes arrêtées, poursuivies, emprisonnées et ainsi éliminées de la vie publique…on peut affirmer sans aucun doute qu’il y a un recul de la démocratie.
G9INFOS : Que dire alors de l’action du gouvernement ?
Georges Bruno NGOUSSI : Je n’attend rien de ce gouvernement. Depuis 2016, nous attendons toujours la clarté sur ce qui s’est réellement passé. Des personnes ont été tuées, votre média RTN a été saccagé, des personnes sont toujours détenues pour des raisons politiques, les populations sont toujours en attente d’une amélioration qualitative de leurs conditions de vie. Depuis 2016, les gouvernements se succèdent sans aucune avancée significative.
G9INFOS : Depuis quelques temps, on assiste à un défilé de chefs d’État africain à Libreville. Tous, affirment être heureux de constater qu’Ali BONGO va bien.
Georges Bruno NGOUSSI : Personnellement, je ne pense pas qu’un défilé de chefs d’État africain puisse justifier l’état de santé d’Ali Bongo. Seul la présentation d’un bulletin de santé pourra mettre un terme au débat.
G9INFOS : Votre mot de fin ?
Georges Bruno NGOUSSI : Dieu ne nous a pas dit qu’il descendra lui-même du ciel pour nous accorder la délivrance. Dieu utilise les hommes, mais si nous les hommes ne voulons rien faire, Dieu permet que ce que nous vivons perdure. Je pense que les gabonais doivent refuser ce qui se passe actuellement dans leur pays. Si ces gens aimaient le Gabon, ils devaient se dire « nous avons fait notre temps, il faut passer le témoin car tout est bloqué ». Et ce n’est pas le gouvernement actuel qui va débloquer la situation que traverse notre pays, cela fait trois ans qu’elle perdure, c’est à dire, bien avant la maladie d’Ali Bongo. Les gabonais sont face à leur destin.
Propos recueillis par Pierre Parfait Mbadinga
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