Parfois, les échéances électorales préfigurent un grand changement politique. Dans le nouvel ordre issu des élections locales et législatives des 6 et 27 octobre 2018, l’un des aspects saillants est la prestation du parti SDG (abréviation de Sociaux Démocrates Gabonais), emmené par Juste Louango Bouyomeko. Aujourd’hui 2 ème force politique sur la scène nationale, en terme de représentativité au sein de l’Assemblée nationale avec 5 elus, le SDG fait bouger le paysage politique gabonais, dans tous les sens du terme. Inauguration en grande pompe de son siège officiel en mars dernier, au quartier Ambowé dans le 1 er arrondissement de Libreville, vague d’adhésion de militants venants de différents partis de l’opposition comme de la majorité républicaine et sociale pour l’émergence, la montée en puissance des Sociaux Démocrates Gabonais s’explique en raison de plusieurs facteurs.
Ces derniers mois, l’Union Nationale (UN), Centre des Libéraux Réformateurs (CLR), l’Union du Peuple Gabonais (UPG), Bloc Démocratique Chrétien (BDC), et récemment Rassemblement pour la Patrie et la modernité (RPM), ont vu le nombre de leurs militants se réduire comme Peau de Chagrin au profit du SDG. Et ce n’est sans doute pas un hasard. Le camouflet électoral de ces partis traditionnels a fait mettre un genou à terre à leurs leaders, mais pas admettre leur responsabilité.
La plupart des démissionnaires dénoncent un manque de visibilité sur l’avenir de leurs anciens partis, malgré l’activisme politique exagéré de leurs présidents. Léthargie, absence sur le terrain, non respect des textes statutaires, climat délétère entre instances décisionnelles et militants de base, peu d’attention portée aux questions de développement social et économique au bénéfice des populations, sont également reprochés aux partis délaissés.
Ainsi, entre d’une part appartenir à un parti politique à bout de souffle, sans véritable objectif ou projet, et de l’autre au SDG, un parti qui se montre déterminé à faire de la politique autrement, le choix est vite fait. De plus, grand nombre de ces démissionnaires considèrent leur décision comme » le premier acte de renouvellement de la classe politique dans le pays ». En effet, on peut quitter le Gabon et revenir mille fois, on a toujours l’impression qu’en politique rien a changé. On est surpris par la longévité des politiciens gabonais. Vous reconnaîtrez les visages qui figuraient dans vos manuels scolaires ou qui apparaissaient dans les journaux télévisés au temps où l’écran plasma n’existait pas. C’est une réalité qui enchante les nostalgiques mais dont le revers de la médaille est moins réjouissant.
En politique, les jeunes pousses souhaitent la rupture avec les pratiques d’un autre temps. Dénoncent les pratiques de grande prédation des fonds publics aux fins égoïstes, et les discours démagogiques appanage « des anciens ». Crée en février 2018, lors de la mutation du mouvement sociopolitique « Front patriotique des ferrailleurs », en parti politique, le SDG apparenté de la majorité républicaine et sociale pour l’émergence, se réclame centriste et progressiste. » Le SDG a pour ambition d’apporter sur l’échiquier politique national un nouveau cadre de pensée et d’action. Il affirme son attachement aux valeurs sociales profondes, au respect des libertés, des droits et devoirs du citoyen ainsi qu’à la promotion de l’excellence », clame son discret leader, Juste Louango Bouyomeko. De quoi séduire les militants d’autres partis dont le ressentiment, après avoir « mouillé le maillot », s’est enraciné et à donné des fruits amers.
Après les dernières élections municipales et législatives de 2018, un renouvellement de la classe politique se dessine nettement. Conscient de la montée vertigineuse de sa jeune formation politique, Juste Louango Bouyomeko boit du petit–lait. « Nous n’allons quand même pas nous excuser de cette vague d’adhésions dans nos rangs », ironise un cadre du SDG.
Pierre Parfait Mbadinga
Laisser une Réponse